Présentation du CLIMS
par Jean-Claude Kolly
Permettez-moi tout d’abord de remercier très sincèrement Mme
Marie Cénec, Pasteure et animatrice à l'Espace Fusterie, d’avoir
invité le Centre de Liaison et d’Information concernant les Mouvements
Spirituels à se présenter et à quelques-uns de ses membres de
présenter certains sujets pour ce cycle de 3 rencontres au
temple de la Fusterie, dont le titre est Nouveaux mouvements
religieux : dialoguer pour mieux se connaître.
Je suis, depuis plusieurs années, le
président du CLIMS. De profession, je ne suis ni sociologue
des religions ni théologien. Je suis ingénieur civil. Je me
suis intéressé aux travaux du CLIMS parce que je suis membre
d’une association spirituelle qui s’appelle Sukyo Mahikari,
dont il sera question jeudi prochain.
CLIMS - Sa fondation, ses objectifs
Permettez-moi de commencer par situer
le CLIMS dans son contexte historique. Dès les années 50, de
nombreux NMR qui auront par la suite un réel succès voient le
jour. Un courant de liberté et de renouveau émerge dans les
années 60. C’est l’époque du New Age, le désir de prendre en
compte l’aspect spirituel des êtres humains dans un environnement
matérialiste. Les communautés deviennent à la mode.
De nombreux NMR s’implantent en Suisse romande.
Un peu plus tard, les livres de J.-F. Mayer comme Sectes nouvelles
un regard neuf et Confessions d’un chasseur de sectes
permettent de se familiariser avec ces nouveaux systèmes de croyance.
Quelques dérives suscitent certains débats et alimentent la presse.
Certaines se terminent devant les tribunaux.
En 1994, un évènement tragique sort
la Suisse romande de sa quiétude : le massacre de l’Ordre du
Temple Solaire à Cheiry et Salvan en octobre 1994, suivi par
celui du Vercors en 1995.
A partir de ce moment, les autorités
se doivent d’intervenir. Le canton de Genève cherche à légiférer
en copiant ce qui se fait en France, où une véritable chasse
aux sorcières démarre :
- des sectes sont mises au pilori via des listes
élaborées par les renseignements généraux français
- des adeptes de mouvements spirituels perdent leur
travail.
- les journalistes saisissent l’opportunité de tenir
un sujet vendeur.
Et personne ne vient en aide à ces adeptes
de croyances qui ont simplement le malheur d’être minoritaires.
Ils sont devenus les boucs émissaires parfaits.
On pourrait dire personne sauf une. Le
pasteur Jean-Claude Basset qui constate l’extrême décalage entre,
d’une part la méfiance et les attaques dont font l’objet les NMR
dans l’opinion publique et les médias, et d’autre part le discours
rassurant des sociologues des religions qui relativisent l’ampleur
du phénomène, et limitent la dangerosité à certaines dérives.
Le pasteur Jean-Claude Basset ose prendre
langue avec quelques membres de ces minorités. L’abbé Alain René
Arbez se joint à eux et ensemble ils fondent le CLIMS en 1997.
Le CLIMS réunit des membres représentatifs
de nombreux NMR. Il n’est ni un syndicat des minorités spirituelles,
ni un observatoire scientifique des groupes religieux. Le CLIMS
a commencé par faire la preuve qu’un dialogue était non seulement
possible mais constructif entre des groupes réputés prosélytes
et exclusifs. L’originalité du projet tient à la participation
de personnes, non des mouvements.
Ses objectifs sont les suivants :
- Répondre à la demande croissante
et largement insatisfaite du public comme des autorités en matière
d’informations fiables, notamment par le biais de son site internet
et de son réseau de consultants. Jusqu’à très récemment, peu de
chercheurs ont fait l’effort d’enquêter sur les NMR. Lorsqu’un
média voulait parler des sectes, il demandait à un apostat et
à un membre d’une association antisectes d’apporter leur témoignage.
J’ai l’impression que ça change car de plus en plus des informations
et des visites sur les NMR sont demandées pour des travaux universitaires,
de maturités, etc.
- Faciliter les contacts entre personnes privées, minorités, Eglises
et pouvoirs publics et, en cas de litige, offrir ses bons offices
ou aider à désigner un médiateur indépendant.
- Veiller à la bonne application en Suisse de la Convention internationale
sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale,
laquelle s’applique également à la discrimination ethnique et
religieuse.
- Offrir un soutien efficace aux lésés et ceci dans tous les cas
: qu’il s’agisse de personnes victimes de discriminations en raison
de leur affiliation religieuse minoritaire ou qu’il s’agisse au
contraire de personnes victimes d’abus au sein de leur propre
groupement religieux.
- Favoriser un dialogue interreligieux critique en tenant compte
des données et des propositions de la charte de bonne conduite.
Sa charte de bonne conduite
La charte a été rédigée au début des activités
du CLIMS en 1997. Dans une société idéale, une telle charte serait
respectée par les pouvoirs publics bien sûr, par les groupes religieux
et les individus également, et aussi par les médias. Vous verrez
que nous ne sommes pas encore dans un monde idéal où le respect
mutuel triomphe.
Tous les membres du CLIMS ont signé la
charte. Ils marquent ainsi leur volonté de contribuer à une coexistence
respectueuse de la liberté de tous et du droit à l’intégrité morale
de chacun. Ils s’engagent à corriger toute dérive portant atteinte
aux droits de la personne. Ils aspirent à développer la confiance
entre les acteurs sociaux dans le cadre légal d’une autorité qui
garantit l’égalité de traitement pour tous ses administrés. Je
vais vous résumer les points de cette charte et profiter de vous
citer quelques exemples des problèmes rencontrés.
Le point 1 précise que la liberté religieuse
est une liberté fondamentale. C’est une condition nécessaire à
la vie démocratique.
Le point 2 explique l’étendue de la liberté
religieuse des personnes : le droit de croire, de ne pas croire,
de changer de croyance, de pratiquer sa foi, le droit de se réunir,
etc.
Le point 3 parle de l’importance du respect
d’autrui et que toute la société trouve son avantage dans le développement
de la paix religieuse.
Le point 4 a été rédigé pour les cantons
laïcs, c’est-à-dire Genève et Neuchâtel, deux cantons qui ont dû,
au cours du 19ème et du 20ème
siècle, rechercher à assurer la paix confessionnelle. Ce qui est
exprimé sous ce point c’est la recherche d’une égalité de traitement
pour tous les administrés. J’aimerais vous relater un cas où une
commune a refusé de louer une salle à un NMR. Quand on a posé la
question au maire quelle était la procédure d’octroi d’une location
et s’il en était de même pour toute religion, il a refusé de répondre.
Le point 5 rappelle que l’adhésion à une
croyance a aussi été l’occasion d’abus. Cette charte a la vocation
de traiter des rapports individuels, communautaires, sociaux et
interreligieux.
Le point 6 précise les libertés individuelles
et les cas qui sont intolérables. Notamment les cas de discriminations
en matière d’emploi. C’est un fait que suivre une croyance minoritaire
se révèle être un handicap. On nous a relaté plusieurs cas de
licenciements abusifs, et également plusieurs affaires perdues
parce que l’entrepreneur suivait une certaine pratique.
Le point 7 concerne la liberté des groupes
religieux ainsi que ses limites. On y a précisé que toute propagande
visant à dénigrer une autre confession est proscrite.
Il y a quelques années, le mouvement raélien
a dû être exclu du CLIMS car il s’en est pris une première fois
à l’église catholique, et malgré nos mises en garde, il s’en est
pris une seconde fois aux musulmans.
Le point 8 conseille aux NMR une communication
ouverte pour faire la lumière sur des aspects sensibles comme
les activités financières et les pratiques religieuses. Bien entendu
il faut que du côté des médias, le traitement de l’information
soit honnêtement pratiqué. Tout journaliste a étudié la philosophie,
malheureusement bon nombre ont oublié ce que Socrate a conseillé
: faire passer ce que l’on a à dire par les trois tamis que sont
la vérité, la bonté et l’utilité. Bon, si on utilisait systématiquement
ces trois tamis, il ne s’écrirait plus grand-chose et on vivrait
dans un silence religieux.
Le 9ème point conseille la pratique du
dialogue interreligieux. Le CLIMS est sur ce point un exemple.
Nous essayons de le promouvoir dans nos associations. Nous avons
organisé, en 2007, une rencontre de membres de NMR qui s’intitulait
dialogue en mouvement, et qui montrait les avantages à dialoguer.
C’est un excellent moyen pour lutter contre
le fondamentalisme et l’exclusivisme.
Le 10ème et
dernier point propose de mettre sur pied un observatoire des phénomènes
religieux. C’est en partie chose faite avec la création du Centre
Inter cantonal sur les Croyances en 2001. La partie aide aux victimes
est offerte par le CLIMS.
Qui sont ses membres
Si l’on se base sur les statistiques du
recensement de 2000, notre activité concerne principalement cette
petite partie de NMR, soit environ 8000 personnes en Suisse. Il
faut ajouter à ce nombre quelques autres minorités. Il faut aussi
dire que bon nombre de personnes sont baptisées et se considèrent
chrétiennes tout en suivant un autre enseignement. Un cumul existe
même s’il n’est pas toujours admissible pour toutes sortes de
raisons par les groupes majoritaires ou minoritaires. Il y a
à peu près une cinquantaine de NMR en Suisse romande, et de nombreux
préfèrent rester très discrets. Nous n’avons que des contacts
épisodiques avec eux.
Les NMR suivants sont représentés au CLIMS
:
- Eglise de l’unification
- Fraternité Blanche Universelle
- Eglise de Jésus-Christ et des Saints des derniers
jours
- Eglise de Scientologie
- Sukyo Mahikari
Ses activités
Le CLIMS se réunit tous les mois et pratique
un échange ouvert entre membres de différents mouvements. Il invite
régulièrement des personnalités à venir présenter leurs travaux,
leurs opinions, etc. Nous avons des contacts réguliers avec des
membres des églises majoritaires.
Dialogue interreligieux
Après quelques années durant lesquelles
le CLIMS a dû promouvoir et défendre la liberté religieuse, la
situation pour les NMR s’est assagie. Il n’y a pas de quoi en
être fier, c’est simplement que depuis le 11 septembre 2001
un autre bouc émissaire a été trouvé : ce sont les musulmans.
Nous continuons d’observer les réactions
des différents acteurs : les autorités, les médias, les groupes
et les individus et à chercher la mise en place d’un modus vivendi
orienté vers la paix religieuse. Il nous est donc possible de
promouvoir, de pratiquer et d’enseigner le dialogue interreligieux.
Nous prenons part à différentes conférences ou congrès organisés
par des NMR ou par d’autres confessions. Je me suis rendu avec
un collègue au congrès mondial sur la miséricorde à Rome, organisé
par l’église catholique il y a 3 ans. Nous avons eu la surprise
d’être les deux seuls suisses à y prendre part. A cette occasion
nous avons pu nous entretenir avec le cardinal Schönborn qui nous
a dit « Dans quelque temps, l’église deviendra aussi une
minorité religieuse ».
Organisation de conférences
Depuis l’année dernière nous avons mis au
point un concept de conférences qui consiste à inviter une personnalité
connue pour son engagement spirituel. Le conférencier s’exprime
sur le thème choisi et ensuite des membres de NMR prennent la parole
sur le même sujet. Nous avons invité M. le Grand Rabbin Dayan à
s’exprimer sur l’universalisme
du judaïsme l’année dernière. La prochaine conférence organisée
aura lieu le 17 avril 2011 ici même, à la Fusterie. Le
révérend McComish nous parlera d'une nouvelle
ère d'obscurantisme.
Aide aux victimes
N’importe qui se sentant discriminé par
un groupe peut faire appel via le site internet du CLIMS à l’aide
aux victimes. C’est le pasteur Jean-Claude Basset qui s’en occupe.
Ce service a un certain succès. Il a permis de réconcilier des
familles, de tranquilliser des personnes, de fournir des renseignements
sur des groupes. Et d’initier des changements chez d’autres.
Dialogue avec les autorités
Les échanges avec les autorités y compris
le CIC sont réguliers. Un exemple : Jusqu’à très récemment,
il était habituel que les autorités justifient une décision par
le fait que tel mouvement était une secte puisqu’elle était mentionnée
sur la liste dressée par les services généraux français. De nombreuses
personnes ignoraient qu’elle avait été invalidée, et que son usage
était particulièrement inadapté aussi bien en France que partout
ailleurs.
Information : site internet (www.clims.ch),
fiches, etc.
Nous essayons de rendre notre site vivant.
Vous y trouvez des fiches sur différents mouvements, des informations
sur certains ouvrages etc.
Jean-Claude KOLLY
Président du CLIMS
Note : Cette intervention fait partie d'une
série de conférences/débats au Temple de la
Fusterie à Genève en mars 2011. Un compte-rendu complet
est disponible en
cliquant ici.
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